Le Musée des Arts Décoratifs, le MAD Paris, se veut un lieu d’inspiration et de transmission depuis sa création au XIXe siècle, et s’active dans une recherche permanente d’harmonie entre le beau et l’utile. Il accueille donc de nombreuses expositions qui trouvent place dans ce bâtiment, parallèle à la rue de Rivoli. Elles sont un peu comme des coureurs lors d’un départ du 100 mètres olympique, alignées dans une passionnante course, dont on ne sait qui va gagner la médaille d’Or de l’intérêt.
Après le sport, thème obligé en cette année de JO et la belle mise en scène de l’exposition « Mode et Sport », ainsi que celle consacrée à la designer hollandaise Iris Van Herpen, 2 autres expositions ont récemment ouvert leurs portes, installées dans les étages, voire les combles du Pavillon de Marsans.
Quand on visite « Parcours: Design, Mode, Bijou » ou « La Naissance des Grands Magasins », situé dans des espaces qu’on a moins l’habitude de fréquenter, on a comme une étrange impression de monter dans le galetas (en France on dit grenier 😉 de ses grand-parents et d’y découvrir avec ravissement plein d’objets chargés d’histoire aux designs bluffants.
Exposition: Parcours design, mode, bijou du 3 avril au 10 novembre 2024
Le musée des Arts décoratifs présente pour la première fois une sélection de pièces de haute couture et de prêt‑à‑porter ainsi que de joaillerie et de bijoux fantaisie, dans les galeries permanentes dédiées au design du xxe siècle jusqu’à nos jours.
30 silhouettes de mode et 100 bijoux de créateurs et de prestigieuses maisons tels que Cartier, Van Cleef & Arpels, Christian Dior, Lanvin ou encore Balmain, dialoguent avec les grands noms du design comme Ettore Sottsass, Ron Arad, Philippe Starck et les frères Campana. Cette présentation permet de révéler les nouvelles acquisitions du musée de ces trois domaines.
Cette présentation thématique se développe sur les cinq étages du Pavillon de Marsan, ce qui permet de s’offrir des vues imprenables sur le jardin des Tuileries et la rue de Rivoli. Elle rend hommage aux célèbres maisons et créateurs de bijoux et consacre une place importante aux créateurs à l’instar de Paco Rabanne, Issey Miyake et Rick Owens. Les grandes maisons de mode sont aussi représentées, Balmain par Olivier Rousteing, Christian Dior par John Galliano, ou encore Courrèges et son directeur artistique Nicolas de Felice et aussi, Stéphane Rolland, entré récemment dans les collections.
Cette présentation inédite permet de poser un nouveau regard sur le design de l’après-guerre à nos jours, français et international, déployé dans un parcours thématique de Nathalie du Pasquier à Martin Szekely, de Jean Prouvé à Charlotte Perriand, en passant par Michael Graves, Roger Tallon et les contemporains Marc Newson et Pierre Charpin. Il met ainsi en lumière les liens créatifs et historiques entre les disciplines des Arts Décoratifs.
Si l’évocation des formes élémentaires et géométriques, qui prévalent dans le design contemporain est l’occasion d’exposer une silhouette de haute couture Christian Dior par John Galliano datant de 2004, figurant une divinité égyptienne antique, la tendance plus récente, consacrée à l’upcycling, qui consiste à réemployer des matériaux dont on n’a plus l’usage, est aussi représentée ici, par Andrea Crews et sa silhouette, mise en regard des bijoux contemporains de Verena Sieber-Fuchs et de Lisa Walker.
Cette question de l’upcycling se pose toujours avec acuité et se prolonge aujourd’hui sur d’autres terrains : la production
de nouveaux artefacts est-elle compatible avec la préservation de notre environnement et des ressources naturelles ? Comment concevoir des objets qui n’aliènent pas leur usager ou leur producteur mais leur offrent au contraire des voies d’émancipation ?
Le Musée propose grâce à cette exposition, un des plus vastes parcours consacré au design contemporain en Europe et permet de découvrir des créateurs et créatrices essentiels, de Charlotte Perriand aux Lalanne, comme une génération plus émergente. Le dialogue constant entre design et métiers d’arts participe à l’intérêt de cette exposition qui nous fait voir les interactions des diverses activités et la richesse de création et de matières.
Cette exposition donne l’opportunité de déambuler dans des espaces moins habituels, ou en dehors de voir Paris d’en haut, on prend de l’altitude, en regardant les inscriptions sur des marches d’escalier ou sur des murs et qui nous montrent que l’on est en pleine ascension, le sommet étant autour de 70 m. Mais c’est plus la beauté de certaines pièces qui sont susceptibles de vous couper le souffle, que le manque d’oxygène, car on respire très bien sous les toits du Pavillon de Marsans. On prend de la hauteur, certes, mais on n’est pas non plus au sommet de l’Annapurna ;).
Exposition: La naissance des grands magasins du 10 avril au 13 octobre 2024
L’autre exposition du Musée des Arts Décoratifs en cours lors de ce printemps est dédiée à la naissance des grands magasins qui deviennent au milieu du 19e siècle les nouveaux temples de la modernité et de la consommation. On découvre les débuts de l’histoire d’enseignes dont certaines nous disent encore quelques choses aujourd’hui, comme Au Bon Marché, Au Printemps, La Samaritaine et les Galeries Lafayette, alors que d’autres ont disparu comme Les grands magasins du Louvre ou Aux Trois quartiers. Ces enseignes dévoilent leurs facettes à travers l’histoire, la politique et la société du Second Empire jusqu’à leurs consécrations lors de l’Exposition internationale des arts décoratifs et industriels modernes de 1925.
Une grande partie des 700 œuvres allant des affiches aux vêtements, jouets et pièces d’art décoratif, issues des collections du musée permettent de comprendre l’évolution du commerce parisien à partir de 1852. Initiés par des entrepreneurs audacieux ce nouveau concept commercial engendre la création d’espace dédié à la femme, bouleversant le panorama de la vente et préfigurant l’avènement de la société de consommation, que l’on ressent désormais quelquefois de nos jours avec réticence.
L’émergence de la mode et sa démocratisation, l’invention des soldes, l’enfant, en tant que nouvel objet marketing, mais aussi le développement de la vente par correspondance, constituent autant de thèmes développés au fil d’un parcours riche en découverte.
Dans une société où se mettent en place les prémices d’une culture de masse et la naissance progressive d’une certaine modernité des loisirs, faire les magasins devient à l’instar du théâtre, du bal, du café ou du concert une nouvelle distraction bourgeoise. Une grande partie de la population française et étrangère accède alors à des biens jusqu’alors réservés aux élites. L’habillement, dont la production se mécanise et se rationalise progressivement, n’échappe pas à ce processus de démocratisation.
L’exposition « Iris van Herpen : Sculpting the Senses » qui a été organisée par le MAD Paris jusqu’au 28 avril 2024, a attiré plus de 300 000 visiteurs.
Cette exposition qui présentait les oeuvres de cette créatrice hollandaise qui sait associer avec maitrise haute couture et technologie a réuni 370 780 visiteurs de février à avril et s’inscrit comme l’un des plus grands succès du musée, comme le souligne le MAD Paris. Le parcours de l’exposition présentait une sélection de plus de 100 pièces de haute couture réalisées par la créatrice, dialoguant avec des œuvres d’art contemporain et des créations de design. Pionnière dans l’usage des nouvelles technologies dans sa discipline, elle transgresse les normes conventionnelles du vêtement tout en utilisant les savoir-faire traditionnels. Elle est l’une des créatrices de mode les plus visionnaires de sa génération, qui a eu l’audace de faire défiler un de ses modèles porté par une mannequin un peu particulière. Il s’agissait de la championne du monde de freefly qui a sauté d’un avion en vol libre avant d’atterrir avec un parachute, bien sûr.
On souhaite un succès aussi marquant pour les expositions en cours. Ces nouvelles thématiques nous emmènent dans des espaces ou on a moins l’habitude d’aller, sachant que la question des déplacements va devenir cruciale pendant l’été. Il faudra surveiller la disponibilité des transports avec notamment les dates de fermeture des stations de métro de la ligne 1 qui desservent ce musée.