La dernière Paris Fashion Week a montré que l’on peut découvrir des initiatives audacieuses au delà des questions de mercato qui agitaient des maisons de mode à la réputation bien établie. Le Palais de Tokyo et son béton brut accueillait la nouvelle collection S/S26 d’ANREALAGE, une maison japonaise qui sait associer depuis longtemps le style et la tech, comme le montre un article de Corinne Jeammet en 2016, une journaliste de mode qui suit cette marque depuis ses débuts et qui a fait son debrief en 2025.
Fondée en 2003, la marque ANREALAGE tire son nom de la fusion de « A REAL » (le quotidien), « UN REAL » (l’extraordinaire) et « AGE » (une époque). Elle est reconnue pour son patchwork délicat, ses silhouettes imaginatives défiant les formes humaines conventionnelles, ainsi que pour son approche novatrice des technologies et des nouveaux matériaux. ANREALAGE a fait ses débuts à la Paris Fashion Week en 2014 et a depuis étendu sa présence sur la scène internationale. C’est d’ailleurs lors de ces débuts à Paris que la marque aurait intégré cette dimension technologique, comme l’a évoqué par quelques mots, le designer Kunihiko Morinaga, rencontré lors du Live Painting qui a suivi le défilé. Un échange réalisé avec l’aide d’une traductrice. Dans le cadre de cette dernière collection, l’idée est de montrer que la notion de différence doit être acceptée et encouragée et bien sûr on ne parle pas que de style vestimentaire.
Un style tout en mouvement
Cette collection S/S 26, s’intitulait « Rendre la vie visible ». elle était symbolisée par un coeur, car le battement du coeur est un peu le centre de la vie. Chaque battement, unique à chacun, est la preuve tangible de l’existence. Il résonne jusqu’à son arrêt, rythme incarnant l’être même. Ces pulsations cardiaques sont rendues visibles à travers la lumière et la forme, insufflées dans le tissu pour créer des vêtements qui semblent vivre.
Elle prenait forme également grâce à la collaboration avec HERALBONY, une entreprise de design et de licence qui travaille avec des artistes handicapés afin de transformer leurs créations en produits et en expériences. Ainsi s’inspirant de la passion et de la sincérité que ces créatifs apportent à leurs pratiques, la collection célèbre l’ouverture à de nouvelles perspectives grâce aux œuvres sincères de dix-huit artistes sélectionnés qui se retouvent sur les modèles présentés.
Les vêtements se transforment en toiles animées de paysages infinis, d’impressions intimes issues d’univers intérieurs profondément personnels. Ornées de motifs imprimés par l’imprimante textile durable FOREARTH de KYOCERA, chaque pièce apparaît comme un acte de création spontané et une visualisation singulière de l’être.
- Dans la première partie du défilé, le battement était exprimé en lumière bidimensionnelle. Des hauts, accessoires, chaussures et sacs équipés d’écrans LCD-LED s’illuminent au rythme du coeur. Les oeuvres des artistes d’HERALBONY, symboles d’existence individuelle, de mémoire et d’éclat vital, sont projetées en LED et vibrent avec la lumière. Chaque vêtement devient un coeur, rayonnant de pulsations lumineuses.
- Dans la seconde partie, le battement prend forme en trois dimensions. Les silhouettes se dilatent et se contractent, palpitant comme des organismes vivants. Des looks qui battent comme un coeur, des robes ondoyantes comme des créatures, des vêtements qui s’épanouissent comme des bourgeons en fleurs. Le vêtement devient vivant, habité par la pulsation. Ces vêtements qui bougent autour du mannequin et se transforment comme si ils prenaient vie, étaient une des surprises de ce défilé.
On pouvait remarquer également que des mannequins défilaient avec des sacs, dont une partie était articulée. Cette partie bougeait quand la personne les touchaient d’une certaine manière, grâce à des capteurs. Ces sacs qui bougent quand on les caresse, le parallèle avec le chat est vite fait, montre qu’au delà du gimmick tech, c’est aussi dans la volonté de la marque, de proposer une mode qui veut faire du bien au mental.











La marque ANREALAGE a toujours aimé intégrer la tech dans sa réflexion. On peut penser, en France, à une designer comme Clara Daguin qui est aussi brillante dans cette démarche. La marque japonaise a l’estime du monde artistique pour cette compétence et on n’est pas surpris de voir Beyoncé portant des modèles ANREALAGE, ni de découvrir que la bande son du dernier show au Palais de Tokyo était composé par Thomas Bangalter (confondateur de Daft Punk, pour les plus jeunes) qui a l’habitude de collaborer avec la marque japonaise.
Heralbony, met l’humain au coeur de la mode
Cette collection ANREALAGE qui s’attaque au défi de rendre la vie visible, n’a pu atteindre sa cible que grâce à la collaboration avec HERALBONY. Née de l’engagement de deux frères jumeaux au nord du Japon, HERALBONY porte une mission simple et puissante : transformer l’image du handicap à travers l’art et le pouvoir des marques.
Ainsi, sous les hauts plafonds du Palais de Tokyo, on pouvait admirer les modèles ANREALAGE dont les textiles qui composent cette dernière collection portent les contours de vie des artistes d’HERALBONY.
Les formes associées aux oeuvres artistiques créées par les artistes de HERALBONY possèdent une force brute, à la fois intensément singulière et profondément vitale. Ce défilé qui accueillait l’équipe d’HERALBONY , les fondateurs et 2 des artistes parmi les 18 dont les oeuvres étaient présentées, allait être complété par un Live Painting 2 jours plus tard dans le Marais.

Crédit Photo © Koji Hirano pour ANREALAGE

[Montage image header depuis les photos de © Koji Hirano pour ANREALAGE]

