C’est donc au centre d’un péristyle en hémicycle du Palais Galliera que s’est terminée cette seconde édition de la Semaine des Autres modes qui s’est déroulée du 2 au 8 octobre 2023. Orchestrée par le collectif UAMEP (Une Autre Mode Est Possible), le but de cet événement est de démontrer que la mode peut s’envisager dans une optique plus responsable, plus soucieuse des ressources de la planète tout en affirmant que sens de l’économie et sens du design font bon ménage.
Un symbole fort que cet endroit quand on sait que derrière les portes, il était 20 h un dimanche, les salles du musée étaient fermées, 140 robes issues de la collection d’Azzedine Alaïa, qui rassemble le plus fabuleux des patrimoines consacré à la mode, se dressaient avec toute la noblesse de leurs coupes, de leurs styles et de leurs soieries.
Peut être chuchotaient elles, entres elles, en se demandant qu’elle était cette activité noctune surprenante, ces éclats de voix à leur porte ? Allait t’on rouvrir le bal du Siècle ?
L’animation nocturne inattendue provenait d’un nouveau mouvement qui s’impose, qui veut proposer une mode toujours aussi désirable et éclatante, mais avec moins de tourbillons, en voulant toujours jouer au rythme du style, mais en tenant compte de contraintes nouvelles, sans pour autant négliger le passé, notamment coté savoir-faire et matières.
Le défilé au Palais Galliera
Orchestré par Paul Cadre et Lea Le Fouest, qui ont organisé une scénographie parfaite, inspiré par un lieu ou escaliers, colonnes et péristyle, donnaient envie de jouer les visiteurs du soir dans cet endroit chargé d’histoire, construit dans un style bien nommé de « beaux arts ». On remarquait la présence des forces vives de l’école de mode de LISAA Mode Paris pour associer jeunesse et look à ce défilé.
Le défilé se lançait après les messages d’accueil et de prospective proposés par Arielle Levy, fondatrice du Collectif UAMEP et initiatrice de cette Semaine et Floretin Letissier, qui après la Tour Eiffel, prononçait un fort message de soutien à l’événement.
Le parcours se glissait derrière les colonnes, ou chaque mannequin non professionnel, pouvait sans jouer les divas, se présenter devant le public, disséminé dans la cour et tout autour, ce qui permettait à toutes les personnes présentes de voir sans difficultés et d’apprécier cette mode qui veut associer upcycling, innovation et inclusion, aux profit de silhouettes contemporaines et modernes qui s’intègrent parfaitement au quotidien des nouvelles générations.
Un spectacle de danse conclut la présentation du défilé, pour montrer que, comme dans la vie, il faut rester souple et savoir rebondir devant les difficultés que quelquefois la vie, et désormais le climat, nous réserve. Mais le vêtement est là aussi, pour au delà de l’image, aider l’humain à se sentir bien et lui faciliter le mouvement.
Ce défilé dans un lieu emblématique de la mode, faisait écho à celui de l’année dernière qui s’était déroulé à la Halle des Blancs Manteaux au coeur de Paris.
Le backstage du défilé
Entre préparation et relaxation, il faut entrainer cette jeune équipe à une organisation quelquefois assez millimétrée pour que le rythme de faiblisse pas. Enthousiasme et bonne humeur régnaient entre les équipes qui se répartissaient les tenues et les silhouettes imaginées par la styliste Lea Le Fouest en puisant dans les créations des équipes de Lisaa, celles des membres du Collectif UAMEP (on a aperçu entre autres des créations de Claire Dartigues) et celles de marques invitées.
L’équipe bénéficiait de ces hamacs verticaux qui permettent de se relaxer tout en orchestrant une animation originale en fin de défilé avec l’aide des danseurs, dans une gestuelle pleine d’énergie.
Le Festival des Réparations à l’Académie du Climat
Le sujet de la réparation ou des réparations a été au coeur de cette édition 2023. La réparation est une autre manière de consommer du textile, plus durable, plus éco-responsable. Le fait de réparer est multiple. C’est à la fois la possibilité de préserver la planète, un individu jette en moyenne 9kg /an de vêtement, mais c’est aussi la possibilité de se réunir, je reprise, tu remailles, de faire travailler des artisans locaux, de retrouver la joie des savoir-faire manuels.
C’est à l’Académie du Climat, située derrière l’Hôtel de Ville de Paris, que s’est tenu ce festival, avec des ateliers, tous complets et des parcours pédagogiques de sensibilisation. On pouvait même venir coudre un bouton sur un vêtement pour faire une oeuvre en co-construction, dont la valeur artistique ne vaudra pas forcément grand chose, mais qui fait un bien fou à l’amour propre, quand on réussi à voir que le bouton fixé sur le vêtement…. tient ;).
Dans cette Académie, place Baudoyer Paris 04, se déroulait en dehors des ateliers, des conférences. Comment en 2023, raconte t’on la réparation, pour ne pas en faire une activité de mamie et la valoriser ?
il y a de nombreux points positifs autour de cette notion de réparer:
- réparer c’est faire durer, c’est préserver les ressources de la planète
- c’est aussi quelquefois une démarche émotionnelle en conservant grâce à la réparation l’usage d’un vêtement qui vient de la famille.
- c’est faire travailler des artisans locaux et retrouver des savoir-faire
- c’est ré-imaginer le vêtement, car réparer et upcycler peuvent avoir des frontières communes
- c’est proposer de nouveaux services. L’achat d’un vêtement peut être associé à une possible réparation future
Le panel rassemblait Elsa Chassagnette de Refashion, Romain Boyer de Lisaa Mode, Lucie Chaptal de We Are Together, spécialiste du « visible mending », Catherine Dauriac de Revolution Fashion France et Arielle Levy, qu’il n’est plus besoin de présenter. Cette conférence était animée par Maurane Nait Mazi du CM CM dont le total look vert montrait l’optimisme que l’on ressent quand on met en avant le sujet de la réparation et son esprit écologique.
Ce sujet de la réparation affronte encore des obstacles. Vu le prix de certains vêtements et leurs matières, la réparation ne s’impose pas autant qu’on le souhaiterait. Aujourd’hui, il y a un coût économique qui n’est pas encore en faveur de la réparation. Refashion, partenaire de la Semaine des Autres Modes estime que le coût moyen d’un vêtement acheté est de
12,5 € alors que le coût moyen d’un vêtement réparé est de 19 €.
Il faut également trouver le spécialiste qui sait comment effectuer la réparation souhaitée, car derrière un terme commun de réparation, il y a de nombreux actes, techniques et métiers différents.
Il faut donc améliorer à la fois la possibilité économique pour les particuliers de faire réparer ou de se lancer dans l’auto-réparation, ce sont les buts visés par le bonus réparation mais il y a aussi la nécessité de former les professionnels qui ne savent plus réparer les produits les plus récents.
Le festival des réparations se voulait donc multiple et cette idée a trouvé de nombreux volontaires quand on constate la fréquentation des ateliers autour de l’atelier Celine Dupuy, ou ceux managés par Good Gang Paris ou encore La Clinique du Pull.
La Tour Eiffel avait précédé le palais Galliera
C’était le point de départ de cette semaine et le symbole du soutien de la ville de Paris pour cette cause. Florentin Letissier Adjoint à la Maire de Paris en charge de L’ESS et de l’économie circulaire, s’est prononcé pour continuer à soutenir cette belle cause et cette Semaine dans le futur. La présence dans le parcours 2023, de l’Académie du Climat et du Palais Galliera montre bien le soutien des édiles de la ville.
Ce lancement a permis de prendre un peu de hauteur et de découvrir que derrière ces moments agréables, sous une température anormalement chaude pour un mois d’octobre, le vêtement qui fait partie de notre quotidien doit avoir une durée de vie plus longue, par le choix des matières et la volonté de le faire réparer, pour que notre qualité de vie soit prolongée.
Retrouvez les marques engagées de cette Semaine au 98 rue de Rennes, Paris 06
Que vous soyez amateur de matières naturelles, ou que vous recherchiez des vêtements qui ont été upcyclés, ré-imaginés, en partant de vêtements déjà existants ou conçus à partir de tissus provenants de stocks dit dormants, vous trouverez votre bonheur dans ce lieu éphémère ouvert au 98 rue de Rennes jusqu’au 28/10.
Il accueille une dizaine de marques qui proposent un vestiaire contemporain et moderne, pour homme et femme. Si ces marques abandonnent volontairement la production en grande série, elles proposent des vêtements pour toutes les situations, en mode work ou afterwork, avec toujours ce petit twist qui donne son caratère à la marque.
CM CM, Consomme Moins, Consomme Mieux, le média qui a suivi la Semaine des Autres Modes
Le support online CMCM a suivi la Semaine des Autres Modes à chacune de ses étapes. Sa rédactrice a été la modératrice de la conférence sur la réparation à l’Académie du Climat. Retrouvez d’autres articles sur cette Semaine sur le site CMCM.
Face à la multiplication des modes et tendances de consommation éphémères et excessifs, CM CM est convaincu que de profondes mutations sont possible, sans créer de nouveaux besoins ni utiliser de nouvelles ressources. Une des solutions préconisée est donc la seconde main. C’est donc un support média dédié à cette cause et qui venait s’ajouter aux autres partenaires comme, la Ville de Paris, Refashion, l’Académie du Climat, Les Canaux, Revolution Fashion France, la Maif et Lisaa Mode.