Il était assez logique après avoir parcouru le salon du Made In France de la Porte de Versailles, évoqué le textile Made In France au moment ou les Jours Tricolores affrontent le Black Friday, d’aller faire un tour dans le superbe Hôtel de Soubise qui en plein coeur de Paris, montre comment l’histoire du textile a évolué dans notre pays.
À l’heure où l’industrie textile est au cœur d’une prise de conscience environnementale et éthique, les Archives nationales reviennent sur son histoire en France afin de saisir l’immense importance économique et sociale qu’elle a occupée dans notre pays, avant qu’elle ne s’effondre à la fin du XXe siècle.
Le Made in France. Histoire sous influence
L’exposition en place jusqu’au 27 janvier souhaite montrer comment l’État a accompagné cette industrie, depuis les efforts de Jean-Baptiste Colbert sous Louis XIV jusqu’aux plans gouvernementaux des IVe et Ve Républiques pour tenter de la sauver des crises économiques. Elle présente ainsi l’action des gouvernements sur plusieurs siècles pour contrôler, connaître et encourager la production du textile français, des fibres naturelles aux matières synthétiques.
L’exposition raconte une histoire du textile « Made in France » en s’appuyant essentiellement sur la riche collection d’échantillons conservés aux Archives nationales dans les fonds consacrés au commerce et à l’industrie, et pour la première fois montrés au public. Particulièrement bien documentés, ces échantillons sont représentatifs de la grande diversité d’une production disparue aujourd’hui, des étoffes les plus populaires, aux plus luxueuses.
En dialogue avec des pièces provenant de diverses institutions, ces archives, mémoire des politiques commerciales menées dans le pays, témoignent de l’importance de cette industrie. Elles représentent une source indispensable pour comprendre l’histoire du textile en France du milieu du XVIIe siècle à nos jours et le rôle central qu’elle a occupé dans la vie de la multitude d’individus qui ont participé à son essor, de la production de matière première à la consommation finale.
Organisée en quatre temps, l’exposition parcourt plus de trois siècles de développement industriel en France qui dessinent en filigrane la doctrine de l’État pour cette filière : connaître, contrôler et soutenir.
On ne vas pas circuler sous les ors somptueux de ce palais, pour admirer des modèles ou des robes de designers. Il n’y en a que peu. On peut y croiser un modèle de robe jaune, réalisé grâce à des…..filets de pomme de terre. C’est l’occasion d’apprendre que des familles aux Etats Unis utilisaient des sacs à pomme de terre pour se vétir lors de la grande dépression de 1929. Une notion d’upcycling avant l’heure.
Le modèle présenté lui a été conçu récemment avec des filets de pomme de terre en plastique récupérés à la fin d’un marché. On avait pu déjà découvrir ce modèle à Sèvres au JAD, lors de l’exposition « Tisser l’avenir, habiller le corps ».
La visite est particulièrement intéressante pour connaitre l’histoire de cette activité textile, ses interactions avec la politique et la géopolitique. On y découvre les indiennes et ce que les chinois proposaient déjà au 18 ème siècle. Loin de la production de masse de la fast fashion, on découvre dans cette exposition, les prémices de l’automatisation, avec les métiers à tisser, la technique du Jacquard et même des distributeurs automatiques de bas nylon dans le métro (1955).
Des ouvrages parfaits pour tout comprendre
L’ exposition propose bien sûr, un superbe catalogue qui complète et rappelle, tout le principe de l’évolution du textile présentée. Mais on peut aussi compléter la visite par l’ouvrage d’Emilie Pouillot Ferrand, Textiles Ethiques, qui dresse un panorama des fibres textiles, décrit les conséquences des procédés de fabrication sur l’homme et évoque les perspectives ouvertes par le courant de la mode éthique. Bref, tout pour comprendre comment consommer sans subir et profiter des savoir-faire textile, sans faire du mal à la planète. L’autrice de cet ouvrage, journaliste de formation, a son blog : mapolloche.com
Un havre de calme au coeur de Paris
Les Archives nationales proposent tout au long de l’année sur les sites de Paris et de Pierrefitte-sur-Seine des projets artistiques et culturels qui mettent en relation archives et création. Ces projets s’efforcent de tisser des liens entre les artistes et les Archives, en tant que lieu de travail et de conservation du patrimoine, en tant que documents et témoignages. Il s’agit d’offrir des possibilités d’approche des documents d’archives, susceptibles de donner à voir la dimension poétique des traces qu’ils recèlent.
Il y a d’ailleurs encore des conférences qui auront lieu en cette fin d’année et début 2025 en lien avec l’exposition en cours.
L’Hôtel de Soubise est par ailleurs un endroit superbe et étonnant, en plein coeur de Paris, qui en dehors des hauteurs sous plafond impressionnantes des salles de cet hôtel particulier, propose de charmants jardins ou faire une pause bucolique.
En dialogue avec l’exposition, les Archives nationales accueillent Anaïs Beaulieu, plasticienne et brodeuse. La présentation de ses œuvres, pour la plupart réalisées à base de matériaux de récupération, prolonge la réflexion sur les enjeux environnementaux de l’industrie textile, tout autour de la cour d’honneur de l’hôtel de Soubise.
Ce projet a été monté avec une cinquantaine de personnes de Seine-Saint-Denis et l’aide de la Société Choletaise de fabrication qui, impliquée dans un une démarche RSE (responsabilité sociétale et environnementale), a fourni les 6 000 m de galon nécessaires à la réalisation de l’œuvre. L’ouvrage « A vos souhaits » d’Anaïs Beaulieu est disponible à la boutique de l’exposition.