Pendant 3 jours, c’est déroulé le Festival des autres Modes à la Cité Fertile à Pantin. On a eu ainsi l’occasion d’entendre une petite musique un peu différente de celle entendue habituellement sous les sunlights et le long des runways. Cette petite sonate du jour, on espère la voir devenir un refrain retentissant repris en coeur par des fans de plus en plus nombreux et sensibles à une expression raisonnée, en terme de production, pas de style, du secteur du textile.
Ce Festival se déroulait donc en un lieu fertile en rencontre, échange, conférence et atelier. Si la route vers une mode durable ressemble à un chemin de montagne au parcours sinueux, si la progression nécessite encore de sortir la machette pour tracer cette voie dans une forêt encore un peu trop impénétrable, le travail d‘UAMEP et de ceux qui l’accompagnent à offert en ces 3 jours d’octobre une jolie clairière, lumineuse et conviviale.
Pendant ces 3 jours, les participants ont pu tisser des liens, aborder toutes les étapes de la chaîne de valeur de la filière textile et créer des ponts entre art et artisanat.

La Cité Fertile à Pantin, sous le soleil

Vous l’avez compris, le but de ce festival n’est pas d’être un endroit à la hype hyperbolisée qui serait susceptible de se dégonfler comme la clientèle des restaurants aux décors trop clinquants pour proposer une cuisine sincère. C’est un premier jalon qui s’intègre dans un plan de route emmenant toute l’équipe jusqu’au 2024, en lien avec les Jeux Olympiques

Le festival s’est déroulé à l’intérieur de deux halls de 1.500 mètres carrés chacun et en extérieur. Il rassemblait cinq Villages (Agriculture, Inclusion, Innovation, Consommation et Aménagement), de nombreuses marques, associations et bien sûr créateurs/créatrices.

Conférences et débats bien argumentés ont exprimé les champs des possibles

Le programme était riche d’envie de montrer les nouvelles voies possibles. Il y avait de multiples occasions de découvrir les options, initiatives et solutions, grâce aux 80 exposants et 50 intervenants, 20 rencontres et projets, 15 workshops, 10 performances artistiques et projections, 12 conférences et tables rondes et 5 villages thématiques interconnectés. Je n’ai pu participer à toutes les conférence mais ai suivi celle qui s’intitulait : « Face aux dérives de l’industrie de la mode et du textile, quels nouveaux modes d’action ? »

festival des autres mode - La Cité fertile
Conférence Festival des autres mode

Etaient présents sur scène :

Une conférence modérée par Catherine Dauriac de Fashion Rev France

Conférence Festival des autres mode
Conférence Festival des autres mode

Si la situation est loin d’être parfaite dans ce monde textile, il y a quand même des avancées. Il faut jouer sur plusieurs tableaux à la fois, agir en utilisant l’outil législatif et réglementaire, mais aussi sensibiliser les consommateurs à regarder plus loin que le prix facial d’un vêtement. Nalya Ajaltouny d’Ethique sur l’étiquette a souligné que la France est pionnière sur certains sujets et que comme le pays va présider l’Union Européenne au premier semestre 2022, c’est à ce moment là qu’il va falloir produire un effort pour que l’Europe et d’autres pays prennent conscience des enjeux.
Isabelle Lefort, qui connait parfaitement bien le monde du luxe, à souligné au nom de Paris Good Fashion, organisme qu’elle a cofondé, que le Fashion Pact est un premier pas, mais que son objectif de 2030, semble trop lointain. La consultation organisée à l’automne 2020 par l’organisme a motivé plus de 100 000 Français qui ont soumis plus de 1000 propositions autour de la seconde main, de la relocalisation ou de la fin des «polybags», ces plastiques qui protègent plus de 4 milliards d’articles de mode. Il y a là, un travail de longue haleine, qu’il faut poursuivre, dans une optique de complémentarité envers les consommateurs d’un coté et vers les entreprises d’un autre coté. Un prochain projet doit voir le jour en 2022, une pétition qui sera lancée pour décarboner la mode et mettre le polyester hors jeu.
La présence de Casa 93 montrait comment le coté éducatif est important. Ce projet qui se matérialise par une école, imaginé après un séjour de Nadine Gonzalez au Brésil, a plusieurs impacts auprès des jeunes et des entreprises. Former des jeunes bien sûr, et de jeunes personnalités qui ne viennent pas des quartiers les plus favorisés, mais également, par une sorte de système inversé, envoyer ces étudiants rencontrer les équipes de créatif de ces entreprises de mode pour qu’ils les challengent et les incitent à modifier leurs habitudes et à revoir leurs modes de penser. Les élèves, génération Z et plus, sont engagés par nature et font passer un souffle nouveau dans des bureaux ou, on le sait, faire évoluer les choses, prend du temps. Gaëlle Constantini exprimait son attitude de créatrice. Elle travaille depuis longtemps sur l’upcycling, depuis 2009, pour ses collections, mais aussi avec des marques, pour les aider repenser leurs process. Elle a travaillé avec le Jacquard Français, Etam et le groupe LVMH pour les aider notamment à monter ce projet de Nona Source qui mutualise les stocks de matière au sein du groupe.

Nona Source avait été présenté lors de Vivatech 2021

En tant que créatrice, elle avait plus de liberté pour expliquer qu’une tendance à suivre, mais difficile à entendre pour certain, et de produire moins et d’acheter moins.
La jeune créatrice à également travaillé avec le château de Versailles, pour montrer que l’upcycling s’inscrit parfaitement dans l’air du temps. Proposés en éditions très limitées, les produits inédits imaginés sont le fruit d’un partenariat entre le château de Versailles, Gaëlle Constantini et Le Lissier, deux marques françaises spécialistes de l’upcycling. Ce procédé, qui consiste à donner une nouvelle vie à un objet de seconde main, leur a permis d’imaginer des produits uniques et originaux. Ces créations bénéficient d’une matière première de grande qualité : les centaines de métrages de tissu de scénographie de l’exposition, présentée en mai 2021 au château de Versailles, devenus disponibles après le démontage de l’exposition.

Globalement, on s’aperçoit que chacun doit continuer à combattre à son niveau, car si il y a bien une prise de conscience, le chemin est encore long. Il y a de multiples actions à mener, pour améliorer le droit du travail, l’empreinte carbone, mais également briser cette idée qu’un vêtement qui vaut moins de 10 € est une norme. Même si les prix doivent augmenter, quand on a peu d’argent, il est possible de faire quelque chose.
Le marketing pousse fort pour faire comprendre qu’une marque égal un style, et comme les marques visent des générations jeunes qui finalement n’ont jamais connus autres choses que la fast fashion le terreau est profitable. De ce coté là, aussi, il faut trouver d’autres discours pour changer les mentalités.

Les ateliers ont rassemblé de nombreux volontaires

Les tables étaient pleines, les mains actives à la recherche du bout de tissu qui allait parer le nouveau modèle. Tout au long du week-end, de nombreux volontaires de toutes générations sont venus expérimenter par eux même qu’un vêtement peut sortir d’un travail manuel et d’une idée et pas seulement d’un sac logotypé.
Parmi les plus actifs, il y avait ceux organisé par Noémie Devime, qui de la teinte de l’indigo à l’expérimentation de matière surprenante, sait proposer à chacun des modèles exclusifs, éco-responsable au look incomparable.

festival des autres mode - La Cité fertile
La Cité Fertile : les ateliers
festival des autres mode - La Cité fertile
Les ateliers : Noémie Devime
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Les ateliers : Noémie Devime
festival des autres mode - La Cité fertile
Création Noémie Devime
festival des autres mode - La Cité fertile
Création Noémie Devime

La boutique, espace de style et de découverte

Répondre au besoin des consommateurs, n’est pas un juron, ni un anachronisme. Et si on se doit de garder un oeil sur l’indice carbone, il faut aussi conserver le plaisir de vouloir paraitre. Si la halle centrale de la Cité Fertile a laissé au cours de ces 3 jours la place à la réflexion et à l’expérimentation en direct de ce que peut être une mode qui se construit de manière durable, la boutique était là pour nous permettre de constater que les produits conçus et imaginés par les marques présentes savent associer conscience écologique et style.
On pouvait y trouver les créations de Louise Marcaud, Noémie Devime, Chaussettes Orphelines et de beaucoup d’autres.

festival des autres mode - La Cité fertile
Création Noémie Devime
festival des autres mode - La Cité fertile
Création Noémie Devime

L’endroit était parfait pour continuer à apprendre en peu plus sur les options possibles qui doivent nous permettre de nous orienter vers une mode plus durable. Une partie littérature toujours instructives avec les livres de Majdouline Sbai, « Une mode éthique est elle possible? » le « Guide de la mode éco-responsable« , ou encore le nouveau ouvrage de Sloweare, qui nous permet de comprendre ce que révèle ou cache une étiquette; « La face cachée des étiquettes« .

festival des autres mode - La Cité fertile

Près de 3000 personnes se sont rencontrées, croisées, ont échangé et découvert que tisser le fil d’une nouvelle histoire est à la portée de tous. Ce festival installé sur des zones d’expérimentation et d’occupation temporaire pour la transition écologique, était composé d’activités à la fois ludiques, créatives et innovantes dédié au textile et à son rayonnement sur le territoire. Il a comme ambition de se dérouler tous les ans sur le territoire du Grand Paris avec comme ligne de mire les jeux olympiques de 2024 et une édition spéciale autour de l’inclusion et la solidarité par le sport et la culture.
La photo du header présente les modèles imaginé et tissé par les équipes de Marcia de Carvalho, fondatrice de Chaussettes Orphelines, qui avaient été présentés lors de son défilé.